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2.1.       Objectif : réduction des déchets ménagers et assimilés
2.1.1.       Territoires concernés ?
Constats : l’entente[1] intercommunale porteuse du projet, coopération conventionnelle constituée pour que les collectivités sortent d’une relation de clientèle et s’engagent solidairement dans l’investissement et/ou la conservation portant sur les installations de traitement des déchets, est constituée de la Communauté Urbaine de Limoges, le SYDED 87 couvrant le département de la Haute-Vienne hors Limoges métropole et Évolis 23. Les déchets traités principalement par l’incinérateur de Limoges et l’ISDND de Peyrat-de-Bellac ne proviennent pas uniquement de ces territoires.



[1] Articles L. 5221-1 et L. 5221-2 du CGCT pour l’entente intercommunale.

[2] https://www.haute-vienne.gouv.fr/Politiques-publiques/Collectivites-territoriales-et-Etat/Intercommunalites/Population-des-EPCI-a-fiscalite-propre-au-1er-janvier-2022

2.1.2.       Évolutions du service public de gestion des déchets en Haute-Vienne et en Creuse
L’entente porteuse du projet s’est constituée suite à la recherche d’optimisation-harmonisation du tri des déchets et de modernisation des centres de tri. Cela a conduit en 2020, pour des raisons économiques, à la fermeture du centre de tri de Noth (5000 t/an) en Creuse et à l’augmentation et l’amélioration qualitative des capacités de triage du site de Beaune-les-mines (passage de 16 500 t/an à 24 000 t/an) en gouvernance mutualisée des membres de l’entente. Cet investissement de 13M€ aura aussi permis d’améliorer les conditions de travail des valoristes avec un passage de 4 à 15 machines de tri et l’amélioration de l’ergonomie des postes de travail. Le site de Beaune-les-mines réceptionne les apports des membres de l’entente plus ceux de la Communauté de Commune Creuse Sud-Ouest. Depuis le 1er janvier 2022, il traite aussi les apports de la Communauté de Commune Creuse Grand Sud.

L’incinérateur de Limoges appartient à la CU de Limoges et est exploité par marché public par Véolia afin de traiter en priorité les déchets de la CU de Limoges et du SYDED 87. Cette installation autorisée pour une capacité de 110 000 t/an peut recevoir les ordures ménagères de tout le département de la Haute-Vienne, depuis deux ans les déchets d’Évolis 23, depuis un an une partie des déchets de la CC Creuse Grand Sud, les refus de tri en provenance du centre de recyclage de Beaune-les-mines, les déchets industriels banals du 87 et hors 87, les déchets des collectivités locales, des médicaments périmés et des déchets d’activité de soins à risques infectieux banalisés. Ce sont 96 718 tonnes de déchets qui ont été incinérés en 2021.

L’ISDND de Peyrat-de-Bellac nommée SUEZ RV ALVEOL appartient au SYDED 87 et est exploitée en concession de service à SUEZ RV Sud Ouest depuis le 1er janvier 2020. Cette installation est autorisée à stocker 60 000 t/an de déchets jusqu’en mars 2039. Suite à l’échec du tri mécano biologique sur cette installation, il a été opté de traiter prioritairement les déchets non recyclables et non fermentescibles de la CU de Limoges et du SYDED 87 sur le site d’enfouissement. La mise en concession, pour rentabiliser la gestion, s’est faite en modifiant de façon substantielle l’exploitation du site par arrêté préfectoral en acceptant les déchets biodégradables, sans convoquer au préalable la commission de suivi de site et sans réalisation d’études d’impact environnemental et sanitaire et sans nouvelle enquête publique. Alors qu’en 2018, le SYDED stockait 25 800 tonnes de déchets en 2020 SUEZ annonce avoir stocké 44 377 tonnes de déchets sans indiquer la provenance de ce surplus par rapport à 2018. Ce site reçoit les encombrants des déchèteries d’Évolis 23 depuis 2019.

Depuis 2018 la Creuse ne dispose plus d’installation d’élimination de déchets suite à la fermeture de l’unique ISDND de Noth arrivée à saturation. Évolis 23 s’est initialement tourné vers l’ISDND de Gournay dans l’Indre pour stocker les déchets, jusqu’à ce que le Préfet de ce département donne un avis défavorable à cette solution sous couvert des limites administratives du plan régional de prévention et de gestion des déchets du Centre Val de Loire. La réception des déchets de la Creuse sur l’ISDND de Gournay ne pourra avoir lieu que jusqu’au 31/12/2022, soit 25 000 tonnes en 2021 et 15 000 tonnes en 2022. Cette fin de non-recevoir semble ne concerner que les collectivités gérant les déchets en régie, les collectivités creusoises déléguant la gestion des déchets au privé ne semblent pas pour l’instant être visées par cette restriction de limite administrative. La CU de Limoges a accepté une partie des tonnages en vertu de la solidarité entre territoire et en application du PRPGD de Nouvelle-Aquitaine (principe d’autosuffisance et de proximité). Cette situation interroge à plus d’un titre. Quelle disposition légale justifie une différentiation de traitement entre les collectivités gérant en régie et celles délégant au privé ?

Concernant le principe d’autosuffisance, particulièrement pour les ordures ménagères résiduelles, il n’est pas raisonnable qu’un département entier soit privé de toutes solutions d’élimination de déchets, c’est le cas de la Creuse mais aussi de la Charente qui elle aussi a sollicité la CU de Limoges pour accepter une part de ses déchets à l’incinération. C’est d’autant plus préoccupant qu’en termes de superficie ces deux départements sont aussi étendus que la Haute-Vienne. La responsabilité de cet état de fait incombe à la région Nouvelle-Aquitaine qui lors de la rédaction du PRPGD n’a pas souhaité planifier la distribution des capacités de stockage d’élimination sur la région, se contentant de rappeler les objectifs de diminution de ces dernières, au profit notamment de grands sites d’enfouissement proches de Bordeaux.

Concernant le principe de proximité, particulièrement pour les ordures ménagères, le PRPGD précise qu’il est admis que les collectivités peuvent avoir recours aux installations des départements voisins. La notion de département voisin n’ayant aucune définition juridique, cela doit présupposer que toute installation se situant dans la région puisse être sollicitée à l’exclusion de celles des régions limitrophes.  Cela est marquant pour la Creuse et plus particulièrement pour les communautés de communes frontalières qui pourraient trouver des solutions avec le Puy-de-Dôme, l’Allier, le Cher ou l’Indre soi-disant interdit sous couvert des limites administratives des différents PRPGD. Dans la logique du PRPGD et de ses interprétations abusives, il serait plus légitime pour la Creuse de solliciter un centre d’enfouissement des Pyrénées-Atlantiques plutôt qu’un département limitrophe appartenant à une région différente. Il faut rappeler que le principe de proximité a été adopté initialement pour éviter l’exportation de déchets à l’étranger (hors zone OCDE).

Concernant le principe de solidarité, il semble légitime que la Creuse sollicite la Haute-Vienne ou la Corrèze qui sont limitrophes et historiquement toutes trois constitutives de l’ancienne région Limousin. On peut constater que la gestion des déchets en Creuse, hormis Évolis 23, n’est pas encore arrivée au niveau atteint en Haute-Vienne. Le bénéfice de cette solidarité devrait s’accompagner d’engagements volontaristes de prévention et de réduction de déchets pour les communautés de commune creusoises.

Vu ces différents points, il semble nécessaire de définir les territoires et donc le nombre d’habitants qui seront desservis par les installations de traitement des déchets pour en fixer leurs capacités avec justesse. S’il est légitime que les capacités soient définies pour commencer à partir des besoins actuels, des objectifs à long terme sur la durée de vie des installations doivent être pris en compte en termes de réduction des déchets à l’horizon 2030, 2040 et 2050.