Ce compte rendu est réalisé par les représentants de Barrage Nature Environnement et de Limousin Nature Environnement, il retrace pour l'essentiel nos préoccupations, et les questions posées lors de cette dernière Commission de Suivi de Site (CSS).

Nous considérons ces réunions de la CSS importantes, car c'est l'endroit où l'exploitant est tenu de présenter tous les documents et informations concernant le fonctionnement de l’exploitation, et ses impacts dans l'environnement... Il est tenu d'y présenter tous les projets importants ou non-substantiels que l'exploitant envisage de porter à son installation.

Cette CSS se déroule sous la présidence de Mme La Sous-Préfète de Bellac.

1ère précision sur la date de la CSS

L’Association pour la Sauvegarde de la Gartempe a fait remarquer lors du bureau de cette CSS que la réunion du 16 décembre 2022 allait porter sur l’activité du site pour 2021. Les éléments ainsi présentés avec une année de décalage rendent difficile l’appréciation que nous pouvons avoir de la réalité de l’activité.

Mme la Sous-Préfète a annoncé que la prochaine réunion de la CSS aurait lieu dans le courant du 1er semestre 2023.

 

Bilan d'activités présenté par l'exploitant Suez

 

1er point ayant entraîné débat

En 2021 ce sont pratiquement 60 000 tonnes de déchets qui sont enfouies dans les *alvéoles, soit la quantité maximum autorisée. Suez a sollicité en 2021 une autorisation exceptionnelle pour dépassement de tonnage annuel pour la réception de 7000 t de déchets supplémentaires en provenance du Syded qui est propriétaire du site mais qui ne semble plus prioritaire pour la gestion de ses déchets, problème que nous avions évoqué avant le passage en délégation de service public.

Ce site, initialement géré par le SYDED, a été conçu (comme le précisait l'Arrêté Préfectoral de conditions d'exploitation) pour recevoir les déchets non dangereux, non fermentescibles suivants : les déchets ultimes issus d'activités économiques et les encombrants de déchetteries ; les déchets non valorisables dans les conditions techniques et économiques du moment issus de déchetteries sont également admis.

Lors des dernières années de l'exploitation par le SYDED, les besoins de l'ensemble des collectivités de la Haute Vienne représentaient environ 26 000 tonnes par an.

Pour une question de rentabilité, le SYDED a cru judicieux de confier la gestion de ce site au privé (le groupe SUEZ).

Suez est autorisé à enfouir 60 000 tonnes maximum, ce qu'il fait, mais avec quels types de déchets ?

Suez a fait rajouter dans l'arrêté Préfectoral qu'il pouvait recevoir des déchets ''biodégradables''. Pour 2021, la majorité des déchets admis sont des déchets d’activités économiques d’apporteurs privés, des refus de compost qui sont fermentescibles et des résidus de broyage automobile qui contiennent des polluants organiques persistants et des retardateurs de flammes bromés (en fonction des concentrations, ils peuvent être classés comme déchets dangereux).

Dès 2019, quelques mois après la prise en main par Suez, lors d'une inspection la DREAL constatait : déchets non conformes.

À cette CSS, nous en sommes toujours au même constat.

Enfouir des déchets biodégradables, fermentescibles comme les papiers, cartons, feuilles, bois, matelas... provoque une augmentation de lixiviats, davantage de rejets de gaz, de pollution dans l'environnement et de risques sanitaires pour la population.

La DREAL qui en 2016 demandait qu'une solution nouvelle soit trouvée pour ne pas rejeter de lixiviats dans le ruisseau du Vignaud constate aujourd'hui que le volume de lixiviats rejetés dépasse le volume autorisé.

Bref : Suez n'a qu'un souci : rentabiliser financièrement son site.

Compte-t-il sur la puissance de son groupe pour faire accepter par l'administration ses exigences, même si cela est contraire aux intérêts de la population ?

C'est le non respect de l'arrêté préfectoral de juillet 2016 et des engagements pris devant la CSS de juin 2019, à la demande de la DREAL, de prévoir de ne plus rejeter de lixiviats dans le ruisseau du Vignaud.

Ce non respect permet l'enfouissement de déchets non ultimes, bio dégradables et fermentescibles, ce qui entraîne plus de décomposition, plus de lixiviats, plus d'odeurs, plus de gaz, plus de pollutions de l'air, plus de risques sanitaires pour la population.

Nous avons demandé à Mme la Sous-Préfète le retour aux engagements pris et le respect de l'arrêté préfectoral de 2016 et que ne soit enfouis sur le site d'ALVEOL que des déchets ultimes non recyclables et non fermentescibles.

2ème point ayant entraîné débat

 Sur une heure de présentation les risques sanitaires pour l'exploitant Suez sont résumés en une phrase :

"Compte-rendu des hypothèses majorantes retenues, les risques sanitaires liés aux émissions en métaux de la torchère équipée du nouveau vapotherm de l'ISDND sont jugés non préoccupants en l'état des connaissances, selon les critères d'acceptabilité."

Pourtant à la demande de la DREAL, l'exploitant Suez a confié au cabinet ARIA Technologie cabinet d'expert du groupe SUEZ spécialisé dans le calcul de la dispersion de polluants, une étude sur l'impact des émissions en métaux de la torchère au vapotherm et une évaluation de risques sanitaires.

Ce rapport de 80 pages, extrêmement précis, détaillé, réalisé par des experts aurait mérité une présentation autre que les 4 lignes sorties de leur contexte.

Dans sa 1ère partie Aria fait la liste des métaux rejetés au niveau de la torchère, détermine l'exposition de personnes vivant au voisinage soit en respirant les substances, soit par ingestion des poussières (particulièrement vrai pour les enfants) soit en mangeant des aliments contaminés (l'existence de jardins potagers privés ne peuvent être exclue autour du site).

Dans le choix fait dans l'étude, 12 substances rejetées sont étudiées.

Dans les substances répertoriées :

- 7 sont toxiques à effets à seuil pour lesquelles il existe des valeurs toxicologiques de référence en dessous desquelles l'exposition est réputée sans risque.

- 5 toxiques à effets sans seuil tels que les cancérigènes génotoxiques pour lesquels il n'est pas possible de définir un niveau d'exposition sans risque pour la population. Pour ces produits, des excès de risque ont été définis. Ils correspondent à la probabilité supplémentaire de survenue de cancers dans une population exposée à 1 μg/m3 (durant toute sa vie et 24h/24) par rapport à la probabilité de cancer dans une population non exposée.

Pour chaque substance une carte de retombées a été dressée

 

On a ainsi les cartes de retombées des différents métaux étudiés.

Ensuite sont étudiés l'exposition par tranches d'âge, par comportement pour déterminer des Quotients de danger par substance.

Pour arriver à leur conclusion (page 44 du rapport) :

 ''Les risques liés aux toxiques sans effets à seuil induits par les rejets en métaux de la torchère équipée du nouveau Vapotherm peuvent être jugés « non préoccupants » selon les critères d’acceptabilité ''.

Nous avons posé les questions suivantes :

- Le risque toxique est peut-être « acceptable » pour les retombées d'un métal, mais qu'en est-il si nous mettons les cartes de retombées de tous les métaux les unes sur les autres, car la population riveraine respire 24h /24, 7 jours /7 et à longueur d'année le cocktail de toutes les substances émises par la torchère?

- Pour calculer le risque sanitaire, faut-il simplement ajouter les quantités de retombées de chaque substance, est- ce que cela multiplie le risque ?

Nous n'avons pas eu de réponses lors de la CSS, mais la responsable de l'ARS présente à la CSS, a confirmé que nous étions en droit de nous interroger et qu'en plus le rapport intéressant d'ARIA Technologie n'étudiait que 12 métaux sortant de la torchère, alors que d'autres substances émises existent, dont les répercussions ne sont pas étudiées. Quant à l'effet cocktail, la représentante de l'ARS a noté l'absence d'étude scientifique sur le sujet.

 

Suite à ce débat rien n'autorise à affirmer comme l’a fait la DREAL dans sa présentation

« - Compte tenu des hypothèses majorantes retenues, les risques sanitaires liés aux émissions en métaux de la torchère équipée du nouveau VAPOTHERM sont jugés non préoccupants en l’état actuel des connaissances, selon les critères d’acceptabilité. »

Pour répondre au questionnement, voire à l'inquiétude légitime de riverains du site, nous demandons :

- que l'étude d'ARIA Technologie soit complétée par l'étude de risques sanitaires liés aux autres substances que les métaux.

- qu'une réponse soit apportée quant à l'effet cocktail de différentes substances pour évaluer le risque sanitaire.

- qu’une réponse soit apportée quant à la compatibilité de stockage de résidus de broyage d’automobile avec l’exploitation en mode bioréacteur.

 

3eme point ayant entraîné débat

L’exploitant a présenté sont projet de déboisement prévu pour l’automne 2023 pour une surface totale de 7,5 ha, à savoir un tiers des 23,7 ha destiné au stockage des déchet, soit la quasi-totalité du casier n°3. A priori, SUEZ RV ALVEOL prévoit donc d’exploiter et combler sur les sept prochaines années quasiment autant que depuis le début d’exploitation du site en 2009.

Il ne resterait plus que les dernières alvéoles du casier°3 et le casier n°4 à défricher pour l’exploitation durant la période 2029-2039. Il semble que cette superficie soit surestimée pour les sept prochaines années, comme s’il était prévu d’enfouir 80 000 t/an alors que l’autorisation ne concède que 60 000 t/an soit 67 500 m3/an. Dans ces conditions, jusqu’en 2029 il peut être estimé que l’on comblerait entièrement les alvéoles C2S3, C2S4, C2S5 et pour partie l’alvéole C2S6. Il n’est donc pas nécessaire et non justifiable de déboiser l’alvéole C2S7 et pour moitié l’alvéole C2S8.

De plus, même si l’on peut comprendre les raisons financières qui poussent à réaliser le défrichement en une seule opération, si l’on considère les impacts environnementaux, cela plaide pour qu’il soit réalisé par tranches.

Nous demandons à ce que le déboisement soit limité au strict nécessaire pouvant accueillir les 60 000 t/an de déchets autorisés et réalisé par tranches.

 

Retrouvez les documents présentés lors de la CSS, sur le site de la DREAL Nouvelle-Aquitaine :

- Présentation de la DREAL : https://www.nouvelle-aquitaine.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/22_presentation_dreal.pdf

- Présentation de l'exploitant SUEZ RV ALVEOL : https://www.nouvelle-aquitaine.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/presentation_suez_rv_alveol_css_16_12_22.pdf

- Rapport ARIA sur les métaux lourds émis par le vapotherm : https://www.nouvelle-aquitaine.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_aria_2021_090_v2.pdf