Le 31/10/19, nous avons remis nos observations au commissaire enquêteur en la mairie d'Oradour sur Glane, sur le projet de création d'un site de tri, transit et regroupement des déchêts d'activités économiques présenté par la société Chimirec Delvert. En l'état, nous émettons un avis défavorable à la demande et le rejet du projet.

Remarque préalable :

Nous ne pouvons que souscrire à la démarche d'améliorer les flux de déchets, leurs conditions de collecte et de gestion en réfléchissant à créer un maillage territorial performant permettant une diminution des distances parcoures par les déchets.

Pour autant l'implantation d'un centre de tri, de transit et de regroupement des déchets issus d'activités économiques nécessite de répondre à des critères environnementaux et de sécurité rigoureux.

Parmi les déchets traités se trouvent des produits inflammables (acides, batteries, déchets inflammables, huiles usagées...) ou dangereux ( amiante....).

Deux exemples récents d'incendie ayant provoqué des pollutions majeures doivent nous amener à être vigilants : l'usine de lubrifiant Minerva-oil (Meuzac 87) et l'usine Lubrizol à Rouen.

Le choix de l'implantation

Le projet précise que le choix de l'implantation est justifié par la présence de grands axes routiers majeurs desservant la zone de chalandise alors qu'une seule route, la D9, dessert la ZA de Puy Gaillard située à  8 km de la N141.

 

Remarque 1

Doivent être précisés le type et le nombre de camions supplémentaires sur la D9

 

L'implantation

Les déchets concernés sont des acides, des batteries, des déchets inflammables, des huiles usagées avec une zone de stockage. La société CHIMIREC DELVERT possède l'agrément pour la collecte des huiles usagées pour la Haute-Vienne et plusieurs départements et elle peut collecter jusqu'à 2000 t/an. Ces produits inflammables représentent un risque réel à prendre en compte.

Il s'agit d'une implantation nouvelle et non de l'adaptation de bâtiments existants, nous devons avoir un regard rigoureux pour diminuer les risques et s'assurer de la possibilité d'intervention et de mouvement des secours en cas d'accident. Cette ZA se situe à 30 minutes des secours incendie.

Remarque 2

  • Il est important que les accès tout autour du bâtiment soient libres et suffisamment larges. Est-il concevable de construire un bâtiment neuf où les services de secours ne pourront intervenir que sur 3 côtés sur 4 ?

Compte tenu des risques potentiels et de l'expérience liée aux deux incendies cités précédemment, il faut revoir l'implantation du bâtiment ; une voie périphérique suffisamment large doit être réalisée autour du bâtiment.

A Priori le terrain d'implantation est trop petit pour le projet.

  • Quel type de matériaux seront utilisés pour la construction, et quelle résistance particulière au feu a été retenue ? Rien n'apparaît dans le dossier.

 

L’installation : activité et impacts

Le bâtiment est divisé en 4 zones

La zone 1 sera dédiée au tri et stockage temporaire au sein d'alvéoles dotées de rétentions adaptées

La zone 2 sera dédiée au lavage des contenants vides

la zone 3 sera dédiée à  l’empotage et dépotage des déchets liquides en vrac, plus aire de pompage et presse à fût

la zone 4 : stockage des déchets liquides

Remarque 3

  • Le dossier parle de réception, tri et stockage temporaire de déchets conditionnés en zone 1, les zones 2 et 3 au traitement des déchets et la zone 4 pour le filtrage des eaux, mais il n'est pas indiqué le délai maximum de ce stockage temporaire sur site, à moins que ce site pourvu d'alvéoles stocke certains déchets définitivement sur place ... ce point sur le stockage développé en p9 mérite d'être plus précis, car nulle part, on ne parle de "valorisation" de ces déchets ou "d'élimination" comme prévu aux rubriques 3510 et 3520 de la nomenclature ICPE* , par conséquent, où se fera la valorisation ou l'élimination ?

 

Quel que soit le type de déchets à un moment donné, l’environnement direct est confronté à des problèmes d'odeurs, de bruit et de divers types de pollutions

Remarque 4

  • qu'est-il prévu pour les odeurs ? Les lieux de stockage devraient être pressurisés
  • quel niveau de bruit est-il prévu dans la zone 3 empotage, dépotage, aire de pompage, presse à fût, sachant qu'une habitation se trouve à 50 m des bâtiments ?
  • l'implantation cite 3 habitations "disséminées" à 50, 150 et 175m,mais la plus proche sera complètement enclavée dans l'emprise du futur site, le sujet des nuisances pour les habitants plus particulièrement de cette habitation en matière de bruit, de risque de pollution des eaux, d'odeurs et d'émanations toxiques n'est pas du tout évoqué. Sont-ils seulement informés du projet ? Il faut que des mesures de protection de ces gens soient définies : haies, moyens de mesure des pollutions de l'air et de l'eau qu'ils consomment, procédure d'intervention (voire d'évacuation) en cas de pollution ...

 

Rejets extérieurs 

Ce type d'établissement est soumis à la loi sur l'eau, il s'agit d'une installation classée qui a interdiction de rejeter des eaux polluées dans la nature. Le projet indique ce qui est prévu pour les eaux pluviales et fait apparaître un séparateur d'hydrocarbures et des bassins de rétention avant le rejet dans une zone d'infiltration située sur le site.

Mais en p10, de la note de présentation, on lit que "les eaux de voirie seront systématiquement analysées avant tout rejet en milieu naturel"

 

Remarque 5 :

Par qui les analyses seront-elles faites, un cabinet indépendant ou des analyses en interne selon les normes de système qualité en vigueur pratiquées au sein même de l'activité donc

  • en interne ? Et quel type d'analyses, des prélèvements en laboratoire ?

Remarque 6 :

  •  Comment ces analyses seront-elles consignées : un registre sur place, des rapports à transmettre systématiquement à la DREAL ?

 

Remarque 7 :

  • En cas de constat de pollution, quel délai de confinement et quelles garanties prévues (nouvelles analyses après 30 jours par exemple) avant que les eaux dans le bassin de confinement prévu en bassin de rétention dédié soient rejetées en milieu naturel ?
  • Si on va plus loin en prévention, en cas de pollutions multiples de ces eaux, les bassins de confinement prévus seront-ils suffisants pour accueillir une série de pollutions répétées ? Ce serait bien que la capacité de ces bassins soit précisée, ainsi que les mesures permettant d'assurer la sécurité sanitaire avant rejet en milieu naturel ... Il ne faut pas oublier qu'il y a des exploitations agricoles proches et que les infiltrations répétées peuvent altérer les eaux souterraines, la Glane et le ruisseau de Laplaud qui ne sont pas si loin. Dire que l’entreprise fera ce qu’il faut pour éviter que cela ne se produise pas est très insuffisant.

Nous demandons des analyses dûment consignées avec indication du jour, des résultats et par qui elles ont été faites, avant rejet s'il n'y a pas pollution avérée et, en cas de constat de pollution, fixer le délai minimum obligatoire de confinement et un éventuel rejet après contre analyses par un cabinet indépendant

 

Remarque 8

Le site va utiliser beaucoup  d'eau soit dans la zone 2 pour le lavage des emballages vides, soit dans la zone 3 pour traiter les fûts pompés et pour la presse à fûts , soit lors du déconditionnement des filtres usagés.

  • Que devient toute cette eau souillée, fortement polluée ?  Le simple passage dans des bacs de rétention est totalement insuffisant. Il manque le traitement des eaux usées et leur contrôle avant tout rejet.

 

Remarque 9 :

En page 15, on parle de "rejet par infiltration sur site", faut-il comprendre que la surface du site ne sera pas bétonnée, ce qui compromettrait justement le recueil des eaux pluviales et donc, leur analyse ? 

  • Il faut demander le bétonnage de la surface de traitement et de stockage comme cela est exigé dans les installations de stockage de produits potentiellement dangereux ou toxiques pouvant affecter les eaux de voirie et de lavage de ces déchets.
  • Enfin, il n'est apparemment pas prévu un bac au passage des camions pour le lavage des roues avant leur sortie du site, comme cela se fait dans d’autres installations de même type, il faut le prévoir, avec périodicité fixée de vidange et curage, afin de limiter au maximum la dissémination à l’extérieur des pollutions du site.

 

Remarque 10 :

Enfin, en p14, le classement de la future ICPE non répertoriée en Seveso, même bas, paraît hâtif au vu du dossier extrêmement léger soumis à nos avis et la liste très large des déchets pouvant être accueillis sur ce site tels que prévus à la rubrique 3510 de la nomenclature ICPE (cf. ci-dessous).

Il nous paraît indispensable que l’étude d’impact qui doit accompagner tout dossier de demande pour une ICPE et la limitation stricte des déchets acceptés sur le site, apparaissent de manière plus rigoureuse dans la demande.

 

3510.Traitement de déchets dangereux

(Rubrique créée par le décret n° 2013-375 du 2 mai 2013)

Élimination ou valorisation des déchets dangereux, avec une capacité de plus de 10 tonnes par jour, supposant le recours à une ou plusieurs des activités suivantes :

- traitement biologique
- traitement physico-chimique
- mélange avant de soumettre les déchets à l'une des autres activités énumérées aux rubriques 3510 et 
3520
- reconditionnement avant de soumettre les déchets à l'une des autres activités énumérées aux rubriques 3510 et 
3520
- récupération/ régénération des solvants
- recyclage/ récupération de matières inorganiques autres que des métaux ou des composés métalliques
- régénération d'acides ou de bases
- valorisation des composés utilisés pour la réduction de la pollution
- valorisation des constituants des catalyseurs
- régénération et autres réutilisations des huiles
- lagunage

 

 

Conclusion : en l'état, nous émettons un avis défavorable à la demande et le rejet du projet.

*ICPE (Installations Classées pour la Protection de l'Environnement)

L'enquête publique se déroule du mardi 15 octobre 2019 à partir de 9 h 00 au samedi 16 novembre 2019 jusqu'à 12 h 00.

Tous les documents sont consultables en mairie d'Oradour sur Glane ou sur le site de la préfecture de la Haute-Vienne.

Télécharger nos observations en pdf, en cliquant sur l'image ci-dessous: